14 800 : c’est le nombre de procès en piratage que le RIAA a intenté à des particuliers durant les deux dernières années. Le RIAA est l’association américaine des marchands vivant légitimement du travail des artistes. Mais les mélomanes (les faux, ceux qui écoutent, pas ceux qui vendent) se laissent de moins en moins faire et n’acceptent plus les « accords à l’amiable » pourtant équitables consistant à faire payer pour l’exemple des fillettes de 14 ans et des grands-pères de 70. Aujourd’hui, explique le National Law Journal, il n’est pas rare que les poursuivis contre-attaquent et accusent le RIAA pour procès non fondé et abus de pouvoir. En Europe, les homologues de ces vendeurs de produits dérivés de la création musicale, que l’on désigne sous le nom générique de « major »*, tentent, souvent avec bonheur, de convaincre les élus de faire passer des lois leur assurant une rente de situation. Bien maigre rente, doit-on dire, car les impôts sur les CD vierges, les DVD, les lecteurs MP3 etc ne se comptent parfois qu’en centimes d’euro. Un symbole, une misère quoi. Et ce n’est pas ça qui parviendra à combler les dépenses faramineuses qu’occasionnent les coûteuses enquêtes montrant combien les « jeunes n’achètent plus de CD » et considérant le « piratage sur Internet comme un moyen pratique d’écouter de la musique ». Il faut absolument éviter le retour aux périodes sombres de l’histoire, quand personne n’achetait le dernier CD de MM J.S. Bach, W.A. Mozart ou L.V. Beethoven. Mais à l’époque, la police était laxiste, et l’on passait n’importe quoi dans les malles-postes. Y compris des partitions. C’est en ce temps là que l’on aurait dû sévir. En imposant une taxe de 3 Deniers sur les outils de reproduction : plume d’oie, cendre, noir de fumée…
Rappelons également qu’il existe de nos jours, dans chaque ville, des médiathèques auprès desquelles il est possible de récupérer des CD musicaux sans avoir à débourser un centime… tarifs d’inscription non compris. Cet insupportable vecteur de piratage, cette scandaleuse habitude qui conforte les auditeurs dans une attitude d’irrespect financier devrait être combattue avec la dernière énergie. Les bibliothèques également, qui offrent à des lecteurs avides le contenu d’ouvrages pour lesquels ils ne versent pas même une roupie. L’incendie de la bibliothèque d’Alexandrie, on devrait en faire un jour de fête nationale. Et puis tous ces gens qui sifflotent dans la rue et diffusent des musiques sans payer de droit à la Sacem… A bien y regarder même, la taxe « anticopie » intégrée à l’abonnement Internet se justifie également. Car il ne faudrait pas oublier qu’originellement, Internet n’était qu’une immense bibliothèque d’Universitaires et étudiants, qui voyaient par là un moyen pratique d’échange d’idées et d’ouvrages. Gratuitement, bien entendu, si le lecteur peut nous pardonner l’usage de ce mot excessivement indécent. Fort heureusement, cette dangereuse orientation, que l’on pourrait qualifier de cryptocommuniste, a été récupérée à temps et remise dans le droit chemin du profit, de l’efficacité et de l’économie de marché. Et s’il n’existe conceptuellement aucune différence entre une bibliothèque et Internet, il ne doit pas, non plus, exister de différence de « paradigme de facturation » entre ces deux genres de structures. Après tout, l’OCDE nous a bien assuré que le début du XXIeme siècle serait placé sous le signe du développement de la vente de services. Et une bibliothèque, si c’est pas du service à l’état brut…